“On voit tout le temps, en automne,
Quelque chose qui vous étonne…”
Lucie Delarue MARDRUS
Si je vous disais que c’est tout à fait exact. Oui, tout le temps !
Un exemple parmi tant d’autres : À Conilhac, ce sera la trente-huitième édition du festival et croyez-vous qu’on s’en lasse ? Que nenni.
Ainsi, dès la fin octobre, on se défait simplement de cette petite accoutumance mélancolique qui jalonne nos journées. Les enfants ont repris le chemin de l’école, l’habitude, les routines tout concourent à nous mener doucement vers l'hiver.
Oui, mais aujourd'hui, à défaut d’aller danser (ça viendra plus tard !) allons écouter de la bonne musique. Allez hop ! Direction Conilhac…
Le croiriez-vous ? L'an passé, nous avions des pluies torrentielles qui embarquaient le barnum. Ce soir, même sombre, le ciel sourit et le public s’attarde dehors dans une tiédeur digne d’un début de printemps.
Mais il est temps d’investir cette salle (y aura-t-il bientôt cet auditorium dont le projet est souvent évoqué ?)
Bien sûr, nos “officiels” prendront la parole, chacun évoquant la qualité de la programmation du festival, sa longévité, son rayonnement par delà les frontières de l’Aude, leur implication et leur fidélité (parfois même dans des envolées passionnées… 😅). Citons,
- Le représentant de la Région, Benjamin ASSIÉ,
- Le second vice président, délégué à la culture de la CCRLCM, Gérard BARTHEZ,
- Le président de la CCRLCM, André HERNANDEZ,
- La vice présidente du conseil départemental de l’Aude, Valérie DUMONTET,
- Le maire de Conilhac, Serge BRUNEL, très ému ce soir et le président du festival, René GRAUBY. Ces derniers salueront la belle implication des bénévoles, la fidélité des institutions, des partenaires et du public.
Bien sûr, ils y seront applaudis… mais l’important - ici - reste bien la note bleue et cette saison en vaut la peine aux dires du Président.
Alors, que la salle s’obscurcit, le public s’impatiente, vite que la scène s’anime, que les bravos saluent enfin les artistes, que diantre !
Nouvelle surprise, pas de première partie et des consignes sévères (si peu) : Pas de photo, pas de vidéo ! Rhoooo, mais quel est donc cet OVNI dont on nous parle et qui exige ?
La voilà qui entre en scène, plein sourire, des jolies fossettes accompagnent des yeux malicieux, toute menue, presque intimidée. Bref, rien d’une diablesse 👿. Elle est suivie de son pianiste. Car ce soir, c’est piano/voix ou l’inverse.
YOUN SUN NAH - d’origine sud-coréenne - saluera l’auditoire d’une toute petite voix, mais ne vous y fier pas. Derrière son micro, elle éclate, elle explose, elle détonne, elle émeut, elle passionne et sa carrière internationale en témoigne. Quant à son pianiste, “la classe internationale”, c’est Jon COWHERD, une pointure. À eux deux, ils enflamment les salles, et quelle chance nous avons. Profitons-en, pleines oreilles :
Une première ovation les accueillera, puis enfin le silence se fera…
Quatre notes sorties de sa petite boîte à musique sur lesquelles se greffera le piano, puis sa voix - pure, presque de cristal pour un “My Funny Valentine” extrait de son dernier album d’une poésie éblouissante. Une mise en bouche tendre, mélodieuse, des sons clairs qui rappellent… un peu l’Asie, oui - si j’étais plus prosaïque, je dirais ces salons de bien être où pierres chaudes et senteurs en tout genre font notre bonheur. Oui, quel bonheur d’être ici avec ces deux là, deux artistes uniques, sans prétention, sans minauderie et qui donnent sans compter. Et privilège de la ruralité, quelques mètres à peine nous séparent des interprètes, voilà toute la différence avec ces grandes métropoles aux salles immenses.
La preuve nous l’avons là, quand la voix sait se rendre puissante et qu’elle augure de bien des surprises ou lorsqu’elle se veut murmure et discrétion, nul besoin de chercher un écran pour surprendre l’émotion, l’intensité des sentiments.
Et nous y voilà - dès le troisième morceau - avec un rêve digne d’une soirée d’Halloween, la voix prend des intonations .. venues d’ailleurs ! Cette voix si pure s’envole alors dans les aigus, de l’opératique je vous dis, puis elle tombe dans des graves, très graves et pour le moins inattendus. La magie va plus loin, les mains s’animent alors, ses grandes mains fines, toujours ouvertes et gracieuses marquent le rythme, un tempo qui accompagne un piano exubérant. L’ovation est immédiate.
Les arrangements instrumentaux autour de chacun des morceaux est précieux, parfois irréel, mystérieux, presque étrange, lunaire mais toujours majestueux. Ils accompagnent un texte répétitif (ou pas), des vocalises, des respirations qui, loin d’être loufoques, forment une trajectoire poétique qui vous attrape. C’est presque obsessionnel.
D’aucuns diront :”Que de superlatifs”, mais c’est tellement singulier, tellement surréaliste, presque expérimental. Un univers onirique qu’il nous faut explorer, une urgence à découvrir !
Elle a de Björk, cette voix qui recouvre plusieurs octaves, un instrument magique qu’elle manie avec une aisance folle et l’artiste (pas folle la guêpe) sait s’entourer, avec ce pianiste aussi démesuré que l’est sa voix. Il y a entre eux une véritable intelligence, une vraie complicité, il s’écoute, se regarde et la folie musicale opère.
Mais au fait, JAZZ ou PAS JAZZ ? J’y perds mes repères et j’aime ça, le public aussi, qui acclame, applaudit des minutes durant. A l’aise avec tous les styles, un grain dans la voix quand c’est nécessaire, ici rock, ici ballade, ici métal, ici pop, ici cristal, ici rocailleux, mais cette femme est un instrument musical à elle seule.
C’est presque un déchirement de devoir la quitter, d’abandonner ce souffle qui n’en finit pas de tenir des notes improbables.
Un choix de roi ce soir, un public acquis qui s’attarde pour une dédicace, un cd, une parole. Une surprise au-delà de tout ce que nous pouvions imaginer. Merci, merci pour cette magnifique surprise, car même lorsqu’elle se pince le nez, elle est INCROYABLE,
Mesdames et messieurs les organisateurs, vous avez placé la barre bien haut pour une ouverture de festival, le public risque de devenir exigeant.
Le prochain éblouissement, paraît que c’est pour la semaine prochaine. Nous verrons. Chaussez vos talons plats, on va danser ????
Toujours est-il que ça dénote d’une volonté de surprendre. On est dans le thème.
Et, je vous laisse apprécier toutes (enfin un échantillon) des prises de vue réalisées par Jacques ...

















