vendredi 22 décembre 2017

PLAIDOYER POUR UN PHOTOGRAPHE

Si dépouillé qu'il impose le panoramique
Ce billet – écrit à l’origine pour les colonnes d'un autre blog - a sa place ici aussi. 
J’ai quelque peu poussé le trait (oh ! à peine), je l’avoue. Quoique vivre au côté d’un passionné impose une certaine souplesse d’esprit. Mais personne n’est parfait, nous avons tous nos petites marottes. Autant s’en amuser.
Et puis, le temps est venu de présenter nos vœux et de prendre de bonnes résolutions. Bon, pour ces dernières, nous verrons cela en  janvier ou en février, ou pas !

De leur propre aveu, ils sont rarement chez eux et lorsqu’ils le sont c’est souvent pour post traiter un foisonnement de photos – ciblées évidemment et de leur point de vue essentielles à leur photothèque.
Je me suis toujours demandée comment on pouvait en arriver là ?
Le numérique n’y est certes pas étranger, l’informatique aussi, la téléphonie non plus… mais tous ne deviennent pas des « geeks monomaniaques ». C’est de ceux-ci dont je voudrais vous parler en cette fin d’année… Oui, j’en ai un à la maison, toi aussi Renée, toi aussi Martine ou Brigitte ou Jean-Pierre, etc.

Ceux-là font feu de tout bois : la pluie qui danse à la lueur d’un phare, le vent qui agite les futaies, des grillages qui ceignent un entrepôt, des locaux désaffectés où courent des murs barbouillés de graffitis, un minuscule insecte ou un énorme cerf en mal de femelle, le coucher du soleil, une poule faisane qui fouille le bas-côté, un geste, une posture, un sourire, que sais-je encore ! Rien ne les réfrène.





Ordinaire et pourtant exceptionnel

Cette passion leur enseigne bien des choses.
La première concerne l’art de ne pas se faire remarquer. Ils savent se rendre presque invisibles, ils ont appris à se déplacer sans bruit.
Cette maîtrise de l’intangible est travaillée quotidiennement. Elle est peaufinée à l’extrême et plus encore à domicile. Ainsi, vous ne les voyez jamais dans la cuisine à préparer le repas ou vaquant d’une pièce à l’autre muni de l’aspirateur. Les avez-vous vu avec le fer repasser ? Savent-ils seulement où se cachent ces indispensables ?
La seconde dépend de l’urgence. Le temps presse toujours pour eux, du lever du soleil à son coucher, tout les ensorcelle : Déjà là tout est dit, mais leur vie peut dépendre de l’envol d’un insecte ou d’un oiseau, d’un baiser, d’une vague, du vent qui joue avec un fil de soie d’araignée, d’une goutte… tout cela est suffisamment délicat et fugace pour éviter qu’ils ne se dispersent.
Mes amis (ies), évitons leur toute pression supplémentaire. Laissons leur le temps de se préparer, de mesurer, de tester… et plusieurs fois si nécessaire.
Ils n’ont que peu de temps à consacrer à votre quotidien. Comprenez, c’est là et maintenant que tout se joue ! Leur système de défense prend souvent pour base « ce moment capital » : Grandiose, subjectif et irrationnel, mais grandiose.
Urgence encore lorsqu’il s’agit de visionner leurs photos. N’avez-vous jamais entendu cette voix qui fend la sérénité de votre matinée besogneuse, cette voix qui vous interpelle de façon quasi péremptoire : « viens voir ! ».  
Pensez ! Une photo sur un écran, ça n’attend pas…
La troisième touche à l’intime. Les passionnés sont épris de leur matériel, ça va de soi. Ils forment un couple, ne s’éloignent que très peu l’un de l’autre, le premier veillant toujours sur l’autre sans équivoque. Pourtant, la photo ne serait rien sans un troisième compagnon et là aussi c’est intense et magnétique ! L’attractivité est énorme entre l’ordinateur et le photographe. Ils sont comme appairés… aimantés. Oui, des amants improbables, mais bien réels ! L’attirance est prégnante dès le réveil. Vite, il faut aller caresser la touche « on » du computer. Parfois ce dernier est juste en sommeil (on évoque ici le réchauffement climatique ou dans un autre billet ?) une simple caresse suffit à l’animer. Alors tout le possible se trouve à portée de doigts … 
Comment lutter contre cette application qui n’attendait que ce moment pour les séduire ? Hep toi ! Petit-déjeuner…
Entre en jeu la quatrième, leur sens de l’observation : celui qui leur permet de saisir l’insaisissable. Oui, ils ont l’œil aguerri, c’est prouvé. Lunettes ou pas, c’est 12/12 à chaque mirette. Rien ne leur échappe… Je vous reparle de l’insecte ou de la pluie qui danse ? Non, vous avez compris.
Cette surveillance constante de l’environnement, cette tendance innée à observer et cette faculté à réagir vite s’appliquent dans leur quotidien. Inévitablement, ils sauront percevoir le malaise, le rictus d’agacement du compagnon, la limite qu’il ne faudra pas franchir sous peine de bannissement.
C’est donc tout naturellement qu’ils vous proposeront d’aller flâner ici ou là, car voyez-vous c’est une journée idéale… pour prendre quelques photos.
Comment leur en vouloir, ils sont inénarrables dans ce numéro de séduction. Et pour peu qu’ils vous emmènent dans des lieux bucoliques, tout ressentiment s’évapore avec le vent qui apporte des odeurs de terre, de mousse ou de parfum de fleurs.
C’est là leur cinquième qualité, celle que je préfère, la sincérité. Ils sont épatants[1], délicieusement attachants, même habités par des priorités si lointaines des nôtres. Elle m’impressionne cette sincérité là, si pleine d’originalité, de rigueur, d’astreinte, de force aussi.
Car s’ils sont passionnés, ils sont tout autant passionnants.  Le fait est qu’ils sont aussi sincères et honnêtes que fidèles : à leur passion, à leur art, à leurs habitudes, à cette urgence à transmettre du beau, du terrible, de l’inédit, du vrai, le détail, une atmosphère, une impression. Et s’ils sont excessifs, c’est uniquement pour défendre cette vérité là : témoigner et rendre compte du moment. Et finalement, n’est ce pas pour cela qu’on les aime.





Un copeau de chocolat et c'est la gourmandise que l'on suggère...

Un oiseau, le renouveau
Souhaitons leur pour 2018 de nombreuses aventures, des situations inédites, belles, joyeuses ou plus mélancoliques propres à les séduire et à nous ravir. Souhaitons leur d’être souvent absents de chez eux car en reportage. Souhaitons leur des clichés exceptionnels, tout en émotion, en technicolor ou en noir et blanc.
Confucius ne disait-il pas : « Une image vaut mille mots ».

Et plus largement, souhaitons à tous les amoureux de la photographie, aux contemplatifs comme aux actifs, et à vous tous qui nous lisez, de très bonnes fêtes de fin d’année avec de belles images - familiales et simples – mais qui seront étonnantes de vérité, de lumières et d’émotions, car prises avec passion.


ÉNORME ou...

minuscule, les détails impressionnent
Tant de spectaculaire pour du panoramique



[1] Comme aurait dit Jean d’Ormesson

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